Le temps parfois conduit à la concision et à l’obscurité, alors, pour ne pas tourner le dos au narratif, ci-dessous un petit texte écrit lors d’un exercice d’écriture autour du mot « alchimie ».
Il manipulait ses éprouvettes avec empressement. Un peu de salsifis, un peu de poudre de renard argenté – tant pis pour lui, le bougre, s’il n’avait pas voulu être apprivoisé – , un peu de sang – toujours du sang en alchimie. Peu importe la source : mouche écrasée, moustique vorace, sang de l’homme, son propre sang.
Gerbert Fratruchminchen les connaissait bien, les règles de l’alchimie. Rien ne s’obtient sans rien. On ne gagne qu’en perdant. L’éternel et ultime principe d’équivalence. Elève du grand maître Fratello Del Piusima, il en avait vu autour de lui, des élèves comme des maîtres alchimistes, qui avec un oeil en moins, qui une jambe disparue en un jour, qui sans langue.
Gerbert Fratruchminchen s’empressait donc. La Baronne Von Pratertuck avait requis ses services. Une petite manipulation mais une manipulation dangereuse. Un rajeunissement de dix ans. Encore et toujours le culte de la jeunesse. Cette manipulation était alimentaire ; Gerbert réservait aux heures de nuit une quête plus grande : la vie éternelle, avec elle, les possibilités du savoir absolu.
Jusqu’aujourd’hui, rien. Toutes ses expériences avaient été un échec. Et ce qu’il craignait le plus : être dans l’ignorance des conséquences de ses actes. Car le prix à payer ne pouvait se révéler que bien plus tard.