Atelier d’écriture en solitaire 6 – Partage

J’ai fait appel aux volontaires, sur la page Facebook de L’Espace Lune, pour des propositions de mot dans le cadre d’un auto-atelier d’écriture en solitaire. Règle du jeu : 5 à 8 minutes maximum pour écrire un texte à partir du mot proposé (qui devra figurer dans le texte). Je note au début du texte, l’heure de début de rédaction, et à la fin, l’heure de fin.

Mot traité aujourd’hui, «Partage». 

17h29

Le moment du partage était toujours un moment de tension. Il le savait bien, lui, Gros Fred, qui en avait fait les frais à plusieurs reprises. Car il avait le cœur aussi large que le corps. D’aucuns auraient dit qu’il était faible, lui se pensait généreux. Et c’était reparti pour des palabres, comme d’habitude, alors que tout avait été pourtant convenu à l’avance, comme d’habitude. Plus le butin était miteux plus les discussions duraient, duraient. Lui Gros Fred, n’avait pas vraiment besoin de ce beurre dans les épinards, il avait déjà un petit emploi pépère dans une supérette de quartier ; il vivait seul, n’avait pas d’ambition et le m’as-tu vu n’était pas pour lui. Mais c’était pour les copains qu’il participait à ces plans souvent bancals, à ces virées nocturnes confuses. Pour les copains, car c’était du genre fidèle, les copains de l’école, ceux qui s’étaient connus morveux. Lassé, il coupa court : « C’est bon, prenez ma part, vous m’offrirez un bon repas un d’ces jours ». Le débat fut clos, après à peine quelques protestations polies. Le Gros Fred n’était pas fâché, il savait que c’était comme ça – et il savait qu’il aurait vraiment, un de ces jours, ce fameux bon repas. Pour lui, c’était ça l’amitié.

17h36

Atelier d’écriture en solitaire 5 – Frangipane

J’ai fait appel aux volontaires, sur la page Facebook de L’Espace Lune, pour des propositions de mot dans le cadre d’un auto-atelier d’écriture en solitaire. Règle du jeu : 5 à 8 minutes maximum pour écrire un texte à partir du mot proposé (qui devra figurer dans le texte). Je note au début du texte, l’heure de début de rédaction, et à la fin, l’heure de fin.

Mot traité aujourd’hui, «frangipane». Pas si facile non plus, essayez…

21h43


Elle en avait plein les mains, de la frangipane, plutôt plein la bouche, sur les mains c’étaient les traces de gras délectables laissées par cette pâte d’amande enrichie. Un beau jaune d’or parsemé de quelques touches plus foncées qu’elle engloutissait, à la cuiller, avec satisfaction, sans gêne, sans aucune arrière-pensée. seule la plénitude de ce moment de gourmandise comptait. il ne fallait surtout pas manger par petites bouchées, non, il fallait que saveur et texture se répandent, omniprésentes pour le palais et la langue ; pour que cette expérience du plaisir fonctionne. Par convention, ou pour cultiver le désir, elle attendait toujours le jour officiel du 6 janvier pour cette dégustation palpitante et s’arrêtait – coupure brutale au plaisir qu’elle essayait ce jour de retenir dans cette dernière bouchée – le 31 janvier. 25 jours irréfrénés parvenaient malgré tout à la combler pour une année. Ensuite, elle vivait du souvenir.

21h51

Atelier d’écriture en solitaire 4 – Essentiel

J’ai fait appel aux volontaires, sur la page Facebook de L’Espace Lune, pour des propositions de mot dans le cadre d’un auto-atelier d’écriture en solitaire. Règle du jeu : 5 à 8 minutes maximum pour écrire un texte à partir du mot proposé (qui devra figurer dans le texte). Je note au début du texte, l’heure de début de rédaction, et à la fin, l’heure de fin.

Mot traité aujourd’hui , « essentiel ». Eh bien, sachez-le, j’ai eu du mal, plus que sur les propositions précédentes. D’où les huit minutes. Page blanche. J’ai même hésité à tricher et à tout recommencer à un autre moment de la journée… Mais même sans huissier pour contrôler mon respect des règles, je m’astreins donc à vous présenter le premier jet.

13h38

Elle ignorait l’essentiel

sous le sol le devenir et les cadavres

Elle ignorait l’essentiel

sur la terre le présent et la foulée ancrée dans l’être

Elle ignorait l’essentiel

Le sang et le ciel

13h46

Atelier d’écriture en solitaire 3 – Vénus au-dessus de l’horizon dans le soir turquoise

J’ai fait appel aux volontaires, sur la page Facebook de L’Espace Lune, pour des propositions de mot dans le cadre d’un auto-atelier d’écriture solitaire et ai déjà reçu quelques suggestions. Règle du jeu : 5 à 8 minutes maximum pour écrire un texte à partir du mot proposé (qui devra figurer dans le texte). Je note au début du texte, l’heure de début de rédaction, et à la fin, l’heure de fin. Mot traité aujourd’hui , en fait toute une phrase :  » Vénus au-dessus de l’horizon dans le soir turquoise ».

18h49

Cette planète avait toujours été une fournaise. Mais quand on était un paria comme lui, on apprenait à l’aimer, cette fournaise – car c’était une fournaise libre. Vénus au-dessus de l’horizon dans le soir turquoise le narguait toutefois. C’était la planète des bienheureux, ou plutôt des bien-pensants voire des bien dociles. Facile de devenir paria dans une telle société. Une opinion un peu différente dite un peu trop fort et le logiciel de détection automatique des déviances, en raccourci LODEAD, envoyait un signal à une cour de justice algorithmique qui prononçait la sentence : désobéissant 1, 2, 3 ; car la subtilité, histoire de justifier la débauche informatique, c’est qu’il y avait des niveaux de non-conformité. Le sien ? A priori largement niveau 3, ce n’était pourtant pas une grande gueule, mais les taciturnes aussi avaient leur lot de non-conformité. Vénus n’était plus pour lui, pas pour le moment en tout cas.

18h55

Atelier d’écriture en solitaire 2 – Ecobuage

J’ai fait appel aux volontaires, sur la page Facebook de L’Espace Lune, pour des propositions de mot dans le cadre d’un auto-atelier d’écriture solitaire et ai déjà reçu quelques suggestions. Règle du jeu : 5 à 8 minutes maximum pour écrire un texte à partir du mot proposé (qui devra figurer dans le texte). Je note au début du texte, l’heure de début de rédaction, et à la fin, l’heure de fin. Mot traité aujourd’hui : écobuage.

20h03


« Allez qu’on m’arrache tout ça ! Tirez, bougres, tirez !  » Sans paraître même entendre les récriminations, de dociles campagnardes et campagnards continuaient leur travail monotone. Sous un soleil qui semblait faire partie de leur peau déjà séchée et de leurs mains calleuses. Le champ il n’y a pas si longtemps fertile partirait en fumée, tel était le devenir des cultures dans cette région endurcie qui pratiquait encore l’écobuage. Parmi ces silhouettes homogénéisées par leur tannage, une jupe un peu plus vive, une main un peu plus frêle – mais pas moins ferme. Une moue un peu narquoise, le champ certes, mais il y avait autre chose, un autre part ou un quelqu’un, dans ces mouvements presque hautains.

20h09